Euthanasie de l’école Sénégalaise, tous coupables
Mon cher élève,
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Tu me reprocheras de déserter l’école constamment, je le sais. Tu dois savoir, cependant, que si je vais en grève, c’est parce que je suis affilié à un syndicat qui lutte pour améliorer les conditions de vie et de travail de l’ouvrier que je suis. Je sais que mon combat hypothèque gravement ton avenir. Tu n’ignores pas, néanmoins, que toi et moi sommes les derniers, les plus faibles maillons d’une chaîne. Cette chaîne qu’est le système éducatif de notre pays est notre raison d’être à tous les deux : toi en qualité d’élève et moi en qualité de maître.
Malheureusement, ce système dont la mission est de garantir notre existence et notre épanouissement a fait de nous des fantômes. Tu n’es plus que l’ombre de l’élève modèle que la société sénégalaise a connu autrefois, et moi, l’ombre du maître jadis adulé, respecté et cité en exemple parce que compétent, humble, volontariste et promoteur de valeurs civiques.
Vois-tu, mon cher,
Quand il t’arrive de boucler ton cyle primaire sans être compétent en lecture et en calcul,
Quand tu préfères prendre le bac plutôt que d’avoir le bac,
Quand toi et moi partageons le même véhicule de transport public pour aller et revenir de l’école,
Quand, à la maison, je ne peux même pas m’offrir une petite pièce où poser une table et avoir un bureau où préparer mes cours et corriger tes évaluations,
Quand on ne m’appelle plus Maître ( défini par Larousse comme « Personne qui possède à un degré éminent un talent, un savoir et qui est susceptible de faire école, d’être prise pour modèle »:
https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/ma%C3%AEtre/48734#hhERhxSiH3hte0ev.99), mais plutôt volontaire, vacataire, contractuel,
Quand, chaque année, il me faut observer des journées de grèves pour recevoir des indemnités de déplacement aux différents examens de l’année prédédente, ou demander l’application d’accords déjà signés,
Quand, à l’heure du numérique, pour rentrer dans mes droits d’avancement, d’alignement, d’intégration, je dois quitter mon bled du fin fond du pays pour me rendre à la capitale afin de récupérer et déposer ici et là, des actes, des projets, un tas de papiers administratifs, et attendre des années pour en voir les résultats…
Véritablement, mon cher, c’est que mon Ecole, la tienne, la nôtre s’est désintégrée complètement. Inutile cependant, d’incriminer l’autre comme on sait bien le faire chez nous. L’autre a toujours tort, c’est lui le coupable, jamais nous-mêmes.
Aussi, toi et moi devons plaider coupable,
Coupables de prendre part, toi en spectateur, et moi aveuglé, à l’euthanasie de notre Ecole républicaine,
Coupables de continuer à avoir peur d’imposer le changement qu’il faut, alors qu’ en définitive, l’école se fait pour et par nous,
Coupables, donc, d’attendre de l’autre ce que nous ne voulons pas exiger de nous-mêmes : le sacrifice.
Mes collègues et moi nous entêtons à demander à l’autre de réduire son train de vie et de nous aligner au niveau de ceux avec qui il s’acoquine. J’aimerais que quelqu’un me dise l’intérêt qu’il aurait à le faire.
Alors mon cher, tâche de ne pas tomber dans le même travers que celui dont je peine à sortir.
Si tu te sens artiste, sache que tu n’as pas vraiment besoin de comprendre les maths
Si tu te sens entrepreneur, alors tu n’as pas besoin de te souvenir de toutes ces dates d’histoire et des grands noms de la littérature française,
Si tu te sens musicien, tes notes de sciences de la vie et de la Terre n’aurons probablement pas d’effet sur ta vie, et
Si tu es un athlète né, exerce ta forme physique plutôt que faire des exercices de physique chimie.
Mon cher élève,
Voilà la triste réalité que toi et moi vivons. Victimes, nous le sommes tous les deux, à des degrés divers bien sur. Les choses ne changeront pas d’elles-mêmes, cependant. Toi et moi résumons la Société. Toi, tu es ce que la société a de plus cher, et elle t’a confié à moi pour que je fasse de toi l’Homme qu’elle veut que tu sois. Nous deux sommes donc ses yeux, ses oreilles, ses mains, mais surtout, son cœur.
Allons-nous prendre la pleine mesure de cette responsabilité, de ce pouvoir?
A très bientôt,
Ton maître
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